Début 2019, une de mes chanteuses japonaises préférées, Yuga, a annoncé qu’elle allait écrire une chanson pour un film. J’ai pu l’entendre de vive voix en concert expliquer de quelle manière le thème de ce film, la maladie d’Alzheimer, faisait écho à son expérience familiale, et ce qu’elle avait voulu exprimer dans ses paroles. Évidemment, il n’en a pas fallu plus pour me donner envie de voir le film en question. La chanteuse a affirmé que même si son sujet était a priori déprimant, le film Nagai owakare ne l’était pas du tout. J’ai eu la même impression après l’avoir regardé lors de notre vol Paris-Tokyo tout début 2020. J’étais vraiment contente qu’il fasse partie des films japonais proposés, car il n’a pas eu une distribution énorme en salles au Japon, et n’est à ma connaissance pas sorti officiellement ailleurs, même si on peut le trouver référencé sous le titre anglais A long goodbye.
Azuma Shôhei, ancien professeur à la retraite, est diagnostiqué avec la maladie d’Alzheimer. A travers principalement sa femme et ses deux filles, le spectateur va voir au fil des années comment sa maladie évoluant impacte le quotidien des personnes qui l’entourent, comment chacun et chacune considère sa relation avec celui qui est un mari, un père ou un grand-père, et dont l’esprit s’éloigne progressivement même s’il est encore bien là physiquement.
Yamazaki Tsutomu est remarquable dans le rôle de Shôhei, on a vraiment l’impression qu’il ne joue pas. L’épouse de Shôhei (Matsubara Chieko) va être bien sûr aux premières loges pour voir l’état de son mari se dégrader progressivement et devoir gérer les conséquences au quotidien, des accusations de vol au supermarché aux disparitions intempestives.
Les deux soeurs Azuma ont une vie et une personnalité très différentes mais sont assez proches malgré la distance qui les sépare. L’aperçu qu’on a de leur vie montre que rien n’est toujours facile que l’on ait choisi la voie « traditionnelle » de la mère au foyer ou celle de l’indépendance par un travail qu’on apprécie. L’aînée, Mari, vit aux Etats-Unis depuis plusieurs années. Elle est mariée et a un fils. Cette expatriation ne va pas arranger les relations familiales, entre son fils de plus en plus distant et son mari (Kitamura Yukiya) qui considère que c’est à elle de gérer ce problème d’éducation. J’étais ravie de retrouver Takeuchi Yûko, dans ce qui a été un de ses derniers rôles sur grand écran avec Tabineko report. La cadette de la famille, Shôko, travaille dans la restauration. Elle va avoir des difficultés tant au niveau professionnel que sentimental. Shôko est interprétée par Aoi Yû, une actrice que j’aime aussi beaucoup.
Le fils de Mari (interprété par deux acteurs différents étant donné que l’histoire se déroule sur plusieurs années) va nouer une relation touchante avec son grand-père même s’il le voit rarement. Enfin, Nakamura Tomoya est aussi au casting de Nagai owakare, dans le rôle d’un ami d’enfance de Shôko.
Certaines critiques ont apparemment reproché au film d’enjoliver la réalité d’Alzheimer. Si certes on ne nous montre pas directement les pires moments, ce n’est pas pour ça qu’on prétend qu’ils n’existent pas ou que ce n’est pas grave. Quel que soit le sujet, on ne peut pas toujours attendre d’un film qu’il ait une dimension purement documentaire et revendicatrice. Avec la population japonaise de plus en plus vieillissante, Alzheimer concerne de plus en plus de monde, donc pourquoi ne pas dédramatiser parfois un peu ? J’ai en tout cas beaucoup aimé l’exemple de cette famille. Si le malade lui, oublie tout, tous ses proches se souviennent, et se souviendront quand il ne sera plus là. Si, comme dans la majorité des longs métrages japonais plutôt récents que j’ai vus, l’OST est agréable sans être marquant, c’était bien sûr un grand bonheur de retrouver Meguru, la chanson de Yuga, pour le générique de fin.
Nagai owakare est adapté d’un roman de Nakajima Kyôko, qui s’est inspirée de son expérience personnelle. Le film a été écrit et réalisé par Nakano Ryôta. Son film le plus récent, The Asadas, va apparemment être distribué en France par Art House. J’espère que sa réception sera bonne et que cela les encouragera à distribuer d’autres films de Nakano :).
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