Titre japonais : ハゲタカ
Nombre d’épisodes : 6
Diffusé en : Hiver 2007
Chaîne de diffusion : NHK
Fiche : DramaWiki
Alors que je suis en train de regarder mon premier asadora, que je vais très prochainement craquer pour un taiga et que je suis Bitter Sugar, actuellement diffusée le jeudi soir, je me demande comment j’ai pu passer aussi longtemps à côté des drama de la NHK. Y compris ceux de 6 épisodes environ comme Hagetaka. Heureusement, je peux toujours compter sur les blogs pour faire des découvertes quand mon radar personnel me fait défaut. Dans ce cas précis, il s’agit d’un billet de Livia qui m’a immédiatement donné envie d’ajouter le drama d’abord à ma grosse liste interminable, puis à ma dernière petite sélection en date.
Hagetaka – qui peut être traduit par le(s) vautour(s) – nous emmène dans l’univers des affaires et des finances japonaises et nous fait suivre pendant plusieurs années le parcours de deux hommes à la fois très différents et très semblables. Le premier, Shibano, travaille au début de l’histoire dans une grande banque qui est mise en difficulté par ses mauvaises créances. Il incarne l’un des rouages du système d’affaires classique japonais, mis à mal depuis la fin des années 80 et l’éclatement de la fameux bulle spéculative. Le deuxième, Washizu, incarne la nouvelle génération qui utilise des méthodes et des capitaux venus de l’étranger et souhaite se débarrasser de ce système gangréné pour relancer l’économie du pays.
Si on nous présente deux façons de voir les choses, il est assez évident dès le départ qu’il n’est pas question de savoir qui a tort ou a raison, qui est le bon et qui est le méchant. D’un côté, Washizu qui ne regarde que les chiffres et s’embarrasse peu des personnes qui se trouvent derrière et des conséquences que peuvent avoir ses actions sur leur vie. De l’autre, un système qui ne semble plus adapté à l’économie internationale, qui a clairement besoin de changements et qui souffre de la corruption.
La série tire habilement des parallèles entre le cas du système financier dans son ensemble et les cas particuliers des entreprises qui ne sont parfois qu’un miniscule maillon de la chaîne. Les enjeux, les objectfs et les méthodes ne sont pas les mêmes suivant le niveau auquel on se situe, et pourtant chacun dépend de l’autre. Les employés d’usine, les entreprises familiales, les patrons, les banquiers, les fonds d’investissement… tous ont des intérêts différents, mais tous sont liés par l’argent.
J’arrête là ma pseudo-analyse pour vous présenter un deuxième point fort du drama : ses personnages et leur interprétation. Washizu, le vautour qui pourrait passer pour le simple gros méchant de service sans la finesse du scénario, se révèle être bien plus que ça. On sent dès le départ, par exemple quand on connait sa douloureuse expérience au sein de la banque où travaille Shibano, qu’il ne peut pas être un homme sans coeur qui écrase les autres pour le prestige et pour l’argent. J’ai trouvé que de telles nuances étaient parfaitement exprimées par Ômori Nao, que je ne connaissais pas du tout mais que j’espère revoir.
Je ne connaissais pas non plus Shibata Kyôhei, qui incarne avec autant de brio Shibano. Tentant de trouver un compromis entre les exigences des banques et celles de leurs créanciers, il finit par douter de beaucoup de choses. Le monde des affaires est un monde d’hommes, et ils ne sont pas là pour montrer leurs sentiments. Pourtant, l’émotion des deux hommes est palpable dans les moments les plus critiques et est exprimée avec beaucoup de justessse. Anciens collègues hier, ennemis aujourd’hui, ils se rendent compte progressivement que si les organisations auxquelles ils appartiennent respectivement s’opposent, eux-mêmes ont en fait un but commun. J’ai trouvé ce duo de tête vraiment admirable, chacun des deux personnages dégage à sa façon une grande classe.
Kuriyama Chiaki incarne Mishima Yuka, jeune journaliste d’une chaîne de télévision qui est liée aux deux personnages principaux du point de vue professionnel car elle suit les différentes affaires financières dans lesquelles ils jouent un rôle, mais aussi du point de vue personnel. Lorsqu’elle était au lycée, son père s’est suicidé car il avait dû déclarer son atelier en faillite suite au refus de sa banque du lui prêter davantage d’argent. La personne qui avait dû lui annoncer la nouvelle, même si la décision venait de plus haut, n’est autre que Washizu. Yuka essaie donc de comprendre comment il a pu devenir un hagetaka. Quelles sont ces motivations réelles ? La mort de son père avait-elle vraiment un sens dans ces conditions ? Cette fois encore, l’actrice se montre tout à fait à la hauteur.
Il n’y a pas qu’à travers le personnage de Yuka que le suicide est évoqué, le thème est même très présent et l’on voit bien qu’il prend une dimension particulière dans un pays où l’échec professionnel est plus facilement vu comme un échec personnel, où quand le père de famille échoue dans sa mission de pouvoir subvenir aux besoins de la maisonnée, il a l’impression de ne plus avoir de rôle à jouer. On ne peut évidemment rester insensible sur un tel sujet, mais tous les « cas » sont présentés avec une grande sobriété, qui n’occulte pas pour autant toute sensibilité.
Le dernier personnage à jouer un rôle clé dans ce drame humain et financier est Nishino Osamu, personnage qui bénéficie lui aussi d’une interprétation sans faille assurée par Matsuda Ryûhei (aux côtés de Kuriyama dans Ashita no Kita Yoshio). Osamu se retrouve lui aussi victime des agissements de Washizu, c’est du moins ce que l’on peut dire d’un certain point de vue. Mais Osamu considère plutôt qu’il a été sauvé d’une situation à laquelle il ne voyait pas d’issue. Et puisque l’argent est le maitre du monde et qu’on ne peut rien faire sans lui, il décide d’entrer dans le grand jeu.
Bien que le tableau que j’ai dressé jsuqu’ici ne semble pas du tout joyeux, Hagetaka n’est pourtant pas le genre de drama qui met le moral à zéro. Si aucun cadeau n’est fait au système économique et financier japonais et qu’on sous-entend que l’avenir du pays n’est pas vraiment rose, il ne se dégage pas non plus de fatalisme ou de pessimisme exagéré. Sur ce point, j’ai trouvé la fin du drama vraiment réussie et pas prévisible.
Hagetaka bénéficie d’une réalisation et d’une photographie sobres mais vraiment soignées. Le drama prend des airs de film, et c’est tout à fait réussi. Le parti a été pris de doter la série d’une ambiance sonore imposante et aux tonalités qui peuvent sembler parfois inattendues pour le genre. J’ai pour ma part complètement adhéré à cette bande sonore, qui créé une véritable immersion.
Pour ne rien gâcher, la chanson du générique de fin (Riches I hold in light esteem, de Tomo The Tomo) est interprétée par une voix impressionnante qui prend vraiment aux tripes. C’est hyper classique niveau mélodie et instrumentation, et ce n’est pas forcément le genre de chanson que j’écouterais comme ça, mais là dans ce contexte c’est vraiment prenant, surtout que les images du générique sont magnifiques. Et les paroles sont apparemment un poème d’Emily Brontë.
Le drama compte donc 6 épisodes, mais ceux-ci durent quasiment une heure chacun. Au final, on a donc l’équivalent de 8 épisodes « classiques », ce qui reste plus court que la majorité des renzoku. J’ai trouvé pour ma part que ce format d’une heure convenait très bien, ça n’est pas trop long. Cela donne au drama un rythme différent, et c’est vraiment appréciable.
J’ai donc vraiment été conquise par Hagetaka et je le conseille vraiment à ceux qui veulent voir quelque chose d’un peu différent. Il ne faut pas du tout être rebuté par l’aspect financier car tout est très bien expliqué et mis en scène, et c’est avant tout un drama humain. La série prouve par la sobriété et l’efficacité du jeu des acteurs que tous ceux qui pensent que le jeu des Japonais et des Asiatiques en général n’est qu’exagération ont tort. Et pour moi qui suis toujours particulièrement aux ambiances musicales des drama, l’OST a sa place parmi les meilleures que j’ai pu entendre.
Pour finir, le roman original dont est issu le drama a également fait l’objet en 2009 (soit 2 ans après le drama) d’un long métrage dont le casting est identique (du moins pour les quatre personnages principaux). La chanson thème est elle aussi identique ! D’un sens, je suis curieuse de voir ce que ça donne, mais de l’autre, je ne vois pas trop l’intérêt. Affaire à suivre !
Commentaires laissés sur l’ancienne version du blog
Heureuse de lire ton enthousiasme sur cette série ! 😉
Tu éclaires très bien tous les points positifs d’un drama très riche sur lequel il y a tant à dire : son approche des milieux financiers se révèle des plus prenantes et captivantes (alors même que la technicité du sujet pouvait inquiéter un peu a priori), la critique sous-jacente sur ce système capitaliste qui s’auto-alimente et échappe à tout contrôle… et puis aussi cette galerie de personnages qui s’imposent, la relation entre Wachizu et Shibano, de la confrontation au respect, m’a vraiment fasciné. J’ai adoré le fait que ce n’était pas une histoire manichéenne, tout n’est pas noir ou blanc, c’est nuancé et ambivalent, avec plusieurs niveaux de lecture suivant le point de vue selon lequel on se place.
Et puis, la bande-son est assez vertigineuse, en parfait contraste en plus avec le sujet traité. La réalisation joue habilement sur les teintes. Les acteurs sont géniaux.
Bref Hagetaka est un grand drama. Il reste un de mes claques sériephiles marquantes devant le petit écran japonais !
Sinon, concernant le film, la dernière fois que j’avais vérifié, je n’avais pas trouvé de sous-titres anglais. Les échos que j’en ai eus laissent entendre qu’il n’apporte pas quelque chose de vraiment en plus par rapport à la série. J’espère quand même avoir un jour l’occasion de le voir.
Écrit par : Livia | 29.11.2011
Merci d’être passée pour donner encore une fois ton avis, et merci encore de me l’avoir fait découvrir !
En effet, à première vue il n’y a pas de sous-titres pour le film, je ne sais pas si ça vaut le coup de les espérer étant donné que je ne suis pas trop au courant des pratiques de fansub pour les films asiatiques. Mais il y a quand même une probabilité qu’une équipe qui bosse sur des drama s’en occupe. A suivre ! ^^
Écrit par : Katzina | 30.11.2011
Très belle critique!
Naturellement, comme Livia et toi, j’ai pleinement adhéré à Hagetaka, tant sur le fond que sur la forme. Je ne renie pas mon intérêt pour des dramas plus conventionnels, mais j’ai trouvé avec Hagetaka (et Soratobu Taiya) un genre différent qui a décuplé mon intérêt pour les séries japonaises.
Écrit par : Asa | 29.11.2011
Je vois que toi aussi tu fais encore plein de découvertes, alors que j’imagine que tu as déjà vu un petit paquet de drama. Soratobu taiya sera très certainement dans ma liste de séries pour débuter 2012 ^^.
Écrit par : Katzina | 30.11.2011
Tiens, c’est bien la première fois que l’on réussit à me donner envie de voir un drama. Je vais essayer de le noter dans un coin ( déjà, je n’ai aucune idée de où on peut les récupérer… Mais bon, à cœur vaillant, rien d’impossible !)
Écrit par : Corti | 30.11.2011
Ca me fait super plaisir si je te donne un peu envie de regarder des drama !
Ca fait quatre ans que je suis tombée dans le bain, j’en ai vu maintenant plus de 130, et les Japonais arrivent encore à me surprendre par la variété de leurs séries télé. Il y a tellement de choses différentes, il y a forcément quelque chose qui peut te plaire, à moins que tu ne jures vraiment que par la 2D ! :p
Si les torrents et les softsub en anglais ne sont pas contre ta religion, tu trouveras plein de choses sur d-addicts 🙂
Écrit par : Katzina | 30.11.2011