Titre japonais : それでも、生きてゆく
Nombre d’épisodes : 11
Diffusé en : Eté 2011
Chaîne de diffusion : Fuji TV
Fiche : DramaWiki
Ce drama diffusé le jeudi à 22h sur Fuji TV à l’instar de nombreuses séries de la chaîne qui font partie de mes préférées n’avait pas échappé à mon radar à ce moment encore performant lors de mon repérage de saison pour l’été 2011. Si les premiers échos n’avaient pas été des meilleures, j’avais ensuite pu lire des critiques très positifs sur plusieurs blogs d’amateurs de séries japonaises. Cela lui avait valu de bien monter en niveau de priorité dans ma liste de séries à voir. Entre ma grosse baisse de consommation depuis maintenant près de deux ans et ma légère réticence à regarder un drama qui s’annonçait être tout sauf une comédie, ce n’est qu’en début d’année que j’ai enfin regardé Soredemo, ikite yuku. Et aujourd’hui encore, j’en garde une impression très forte.
Le jour où Kenji, le fils aîné des Misaki, a tué Aki, la fille de 7 ans des Fukami, la vie des deux familles s’est effondrée. Quinze ans après les faits, Futaba, la petite soeur de Kenji, vient à la rencontre de Hiroki, le plus âgé des deux frères d’Aki. Cette rencontre va être le déclencheur d’une série d’événements qui va, non sans douleur, mener chacune des personnes concernées par le drame à pouvoir recommencer à avancer.
Hiroki est du même âge que Kenji et était ami avec lui. Le jour du drame, il a refusé de jouer avec sa soeur, la laissant seule. Pour ces raisons, il se sent responsable de ce qui est arrivé. Ce choc indélébile survenu pendant son adolescence a fait de lui un jeune adulte maladroit dans ses relations avec les autres. Il vit presque reclus avec son père au bord d’un petit lac et l’aide à faire tourner sa petite boutique. Eita prouve encore une fois son talent et est aussi crédible que touchant.
Futaba était proche de son frère Kenji. Elle souhaite le revoir pour qu’il explique son acte, et semble même encore espérer en quelque sorte qu’il soit innocent. N’ayant pu tisser de liens avec personne à cause de son étiquette de soeur de criminel qui semble indélébile, elle est aussi solitaire que Hiroki. Mitsushima Hikari est on ne peut plus juste dans ce rôle, et forme avec Eita un duo central qui fonctionne parfaitement.
Fukami Kyôko, la mère de Hiroki, Kôhei et Aki, pourrait sembler au premier abord avoir surmonter la mort de sa fille. Si elle a divorcé du père de ses enfants suite au drame, elle vit aujourd’hui calmement avec son deuxième fils et sa famille composée de sa femme, son jeune fils et son beau-père (Danta Yasunori). On se rend cependant rapidement compte que sa peine la ronge de l’intérieur et que la haine exprimée envers celui qui lui a pris sa fille et toute sa famille n’a rien pu faire pour l’apaiser. Otake Shinobu est bouleversante, et j’ai déjà eu l’occasion de la revoir dans un autre rôle qui m’a aussi montré qu’elle est une grande actrice.
Le divorce des Fukami a également causé l’éloignement de leurs deux fils. Hiroki a donc choisi de vivre avec son père, et Kôhei (Tanaka Kei) est resté avec sa mère. On voit qu’il a joué auprès d’elle un rôle de protecteur, et il ne voit pas d’un bon oeil les changements amenés par la rencontre entre Hiroki et Futaba car il semble convaincu qu’il vaut mieux pour sa mère que rien ne change. Deux fils, et deux manières de voir la situation mais avec la même volonté de tenter d’apaiser la douleur de leur mère.
Fukami Katsuhiko (Emoto Akira), le père d’Aki, n’a même pas comme sa femme eu la force de se construire une façade tellement il est rongé par la culpabilité et la stupeur qu’un adolescent de l’âge d’un de ses fils ait pu s’en prendre à sa fille.
La famille Misaki a elle aussi en quelque sorte perdu un enfant lors du drame d’il y a quinze ans, et chaque jour passé leur a durement rappelé ce qu’avait fait leur fils. Ils ont changé de nom (en divorçant puis se remariant en choisissant le nom de l’épouse, Tôyama), mais cela n’a pas suffit à ce que l’on ne les reconnaisse pas. Aux yeux d’une société où l’unité d’un groupe est si importante, qu’il s’agisse d’une entreprise, d’une classe d’école ou d’une famille, ils sont autant responsables que leur fils. Mais que peuvent-ils bien faire ? S’excuser ? De quoi sont-ils responsables au bout du compte ? A quoi bon, puisque ça ne ramènera pas Aki ?
Fubuki Jun et Tokito Saburo sont l’un comme l’autre dans le rôle de ce couple victime de la société, qui tentent tant bien que mal de vivre au gré des déménagements et des emplois précaires. La petite dernière de la famille, Akari (Fukuda Mayuko, qui a grandi !), montre l’absurdité du traitement infligé aux Misaki/Tôyama : elle était encore dans le ventre de sa mère au moment du drame, et pourtant, en tant que soeur du meurtrier, elle est dans le même bateau et subit les mêmes discriminations. La situation de la famille n’a pas été sans me rappeler le drama Suitei Yûzai, ou est évoquée entre autres la manière dont est vue par la société la fille d’un condamné.
On apprend que Kenji, celui qui est à l’origine de tout, est sorti depuis quelque temps de la maison de redressement où il a purgé sa peine, étant mineur au moment des faits. Il travaille maintenant chez un producteur de fruits qui aide à la réinsertion des jeunes, et porte désormais le nom d’Amemiya. Il ne semble pas souhaiter revoir sa famille et n’a plus de contacts avec elle.
C’est Kazama Shunsuke qui tient le rôle de Kenji, et j’ai eu un peu de mal avec son interprétation. Je le connais à peine, je l’ai juste aperçu dans Jun to Ai, drama que je n’ai pas du tout apprécié (comme je l’ai raconté dans ces quelques lignes), mais où ce n’était pas vraiment lui le problème. Kenji est un personnage qui met mal à l’aise et il serait étonnant qu’il n’en soit pas autrement, c’est certain. On essaie nous aussi de comprendre ce qui se passe dans sa tête et si on peut le comprendre à défaut de le pardonner, mais cela n’a rien d’évident. Et si on n’arrive pas à cerner le personnage, c’est parce que l’acteur en fait trop, ou pas assez. Les deux en fait. Enfin, Kenji est aussi le personnage concerné par le seul point du scénario qui m’a un peu dérangée. Une fois n’est pas coutume, je vais spoiler sur ce point donc j’écris le paragraphe suivant en blanc. Ceux qui n’ont pas peur surligneront le texte avec leur souris :).
On finit par comprendre que c’est un trouble mental qui a conduit Kenji à faire ce qu’il a fait. Cependant, vu ce qu’on nous dévoile à propos de ses parents et de son enfance et la façon dont cela interfère, on a l’impression que c’est uniquement cela qui est à l’origine de sa maladie, et qu’il ne serait pas devenu un criminel s’il avait été un enfant sans histoire. Je trouve ce raccourci un peu gros, il peut amener certains à croire que n’importe quel trouble mental est causé par l’entourage d’un enfant. Cela peut sûrement être un déclencheur, mais il faut qu’il y ait quelque chose à la base.
Différents personnages évoluent autour de Kenji sur son lieu de vie et de travail. L’un d’eux et bien évidemment son patron, Kusama Gorô, qui prend sa défense lorsqu’on reproche son passé au jeune homme. L’acteur Ono Takehiko est dans le surjeu un peu typique des hommes d’un certain âge, mais on ne le remarque que parce que le jeu des autres acteurs est excellent dans l’ensemble. Saho (Andô Sakura), la collègue de Kenji, n’a pas l’air d’être un ange. Elle se méfie de lui et se montre assez dure.
Je termine le passage en revue des personnages avec Satsuki (Kurashina Kana), une jeune femme que Hiroki et Futaba vont rencontrer et à travers laquelle est traitée la question de la condamnation des mineurs. Un garçon de 15 ans est assez grand pour comprendre que tuer est un crime. Pourtant, il n’est pas puni de la même manière qu’une personne majeure. Cela peut encore plus porter à débat dans un pays où la majorité est à 20 ans et où comme on l’a vu, la famille est jugée responsable comme si elle avait commis l’acte elle-même.
On a le droit de se demander ce qu’on peut bien nous raconter sur 11 épisodes alors que dès le départ, le drame dont il est question est passé depuis bien longtemps. Qu’il y a-t-il à dire au juste ? Hé bien énormément de choses, comme vous avez sûrement déjà pu l’entrevoir à travers la présentation des différents personnages. Il ne s’agit pas de les regarder à longueur d’épisode pleurer et se lamenter sur leur sort, mais de les voir enfin, petit à petit, parler, dire ce qui les ronge à ceux qui sont eux aussi concernés par le drame, dans leur propre famille ou aux autres, l’autre famille, ceux qui devraient rester nos ennemis, ceux qu’on pensait qu’il suffirait de détester de toutes ses forces pour que la peine parte enfin, ceux qui devraient payer, alors qu’ils n’ont jamais demandé à ce que tout cela arrive.
Mais au bout du compte, d’un côté comme de l’autre, on est victime. Les uns ont la sympathie des gens et s’en moquent parce que cela ne ramènera pas celle qu’on leur a enlevé de manière si ignoble. Les autres sont traités comme des pestiférés qui devraient passer le reste de leur existence à s’excuser alors que ça non plus, ça ne changera rien. Par l’extériorisation de ses sentiments, de sa part de culpabilité, par l’écoute et la compréhension de l’autre, pourtant, chacun va pouvoir avancer un peu.
Autour des deux personnages principaux dont la rencontre est déjà si improbable, Sakamoto Yûji (à qui l’on doit entre autres le poignant Mother) met en scène au fil des épisodes d’autres rencontres, à la fois redoutées et recherchées, entre les membres des familles Fukami et Misaki. Tout se joue sur des dialogues d’une finesse et d’une authenticité telles qu’ils ne peuvent que captiver et toucher le spectateur.
On est dans le drame, mais on est aussi dans le quotidien, et c’est parce que Soredemo, ikite yuku rend très bien cela qu’il est si crédible . Les protagonistes sont des gens comme les autres, pas des héros ou des stars. Ils peuvent être mal coiffés et mal habillés. Ils ne sont pas définis uniquement par le drame qui les a touchés. C’est pour cette raison que le drama n’est pas du tout dénué d’humour. En raison de leur maladresse, Hiroki et Futaba se retrouvent plusieurs fois dans des situations tout à fait drôles. Tout ça s’intègre parfaitement dans l’histoire et présage de cette lumière que l’on veut voir au bout du tunnel, pas une lumière aveuglante, mais une lueur d’espoir.
Cette lueur d’espoir apparaît aussi dans les images du drama : les personnages évoluent dans un décor largement non-urbain, et une grande importance est accordée aux paysages, qui bénéficient de plans réguliers. Le lac au bord duquel habite Hiroki, les montagnes de Yamanashi… ce sont les hommes le sujets, pas la nature, mais sa présence est apaisante. Les couleurs parfois un peu saturées donnent un côté ancien et nostalgique à l’ensemble.
La bande sonore de Soredemo ikite yuku a été composée et en partie interprétée par le pianiste et compositeur Tsujii Nobuyuki. Le thème principal, déclinée en une multitude de version (piano, orchestre, guitare, différents tempos), commence sur une mélodie triste qui se transforme ensuite en envolée pleine d’espoir (en jouant il me semble sur une dominante mineur puis majeur). Cela convient évidemment parfaitement au thème de la série. Utilisée à bon escient, la musique remplit son rôle à la perfection. J’ai beaucoup aimé les versions guitare, qui apportent vraiment un plus à l’ambiance orchestre/piano très habituelle. Outre les compositions originales, l’OST contient des interprétations de Chopin et Rachmaninov.
La chanson thème du drama, utilisée dans le générique de début, est interprétée par Oda Kazumasa et est tout simplement magnifique. Le nom du chanteur m’était inconnu, et je ne suis pas certaine qu’il fasse le genre de musique que j’apprécie, mais cette chanson est parfaite. Une voix remplie d »émotion, une mélodie nostalgique mais pleine d’optimisme, toute l’ambiance du drama est posée !
Dénué de la noirceur de Shokuzai, prenant un drame pour point de départ et non comme destination finale sans issue comme Home Drama, Soredemo ikite yuku n’a rien d’un mélodrame larmoyant. Avec ses dialogues si bien écrits et ses personnages criants de vérité, il expose avec une grande finesse les différents aspects d’un drame familial. Sans cacher les failles multiples des êtres humains, il se veut optimiste. Notre empathie est sollicitée mais on ne cherche pas à nous faire déprimer. Il ressort de toutes ces émotions, de ces images et de ces mélodies une grande beauté, que les petits défauts que j’ai relevés ne parviennent pas à gâter.
Le manque de temps – et uniquement le manque de temps – fait que je regarde moins de dramas également, mais j’ai vu comme toi tellement d’avis positifs sur ce drama (dont le genre est pourtant loin d’être mon genre de prédilection) qu’il va vraiment falloir que je le regarde un de ces jours! En fait, je ne me souviens pas d’avoir lu un avis négatif à son sujet. Merci pour la piqûre de rappel!